1/24/2011

Un petit tour à Vienne

Au début de chaque année, un grand symbole de la misogynie dans le monde de la musique dite classique envahit les écrans du monde entier: le concert du nouvel an de l'Orchestre Philharmonique de Vienne. Car cet orchestre résiste farouchement à la présence de musiciennes dans ses rangs. On n'y compte actuellement que 4 femmes sur un orchestre de 128 personnes: Isabelle Ballot parmi les premiers violons, Ursula Plaichinger et Daniela Ivanova parmi les altos et Charlotte Balzereit à la harpe.

Rétros, les Viennois, ils ne font pas mieux que les grands orchestres parisiens du début du XXe siècle!

Il se trouve qu'ils en sont fiers, dans un esprit autant raciste que sexiste. Ce n'est que le 27 février 1997 que l'orchestre a admis officiellement des femmes. Une harpiste qui en faisait partie de manière inofficielle depuis 26 ans, Anna Lelkes, est alors devenue membre, et ceci un jour avant un concert de l'orchestre à Carnegie Hall, où l'attendait une manifestation féministe menée par l'International Alliance for Women in Music. Pour tous les détails, voir le site de William Osborne, un musicien américain qui s'est engagé dans la lutte contre le sexisme du monde de la musique, après la discrimination dont a souffert son épouse, la tromboniste Abbie Conant, quand elle faisait partie de l'Orchestre Philharmonique de Munich.

La situation s'améliore-t-elle? On compte en ce moment 3 femmes sur les 13 personnes en attente de titularisation: Albena Danailova, qui fait partie des quatre super-solistes, Olesya Kurilak parmi les premiers violons et Ursula Wex parmi les violoncellistes. Mais, face à cette arrivée "massive" de musiciennes, l'orchestre en rajouterait-il dans la provocation? En effet, le concert de nouvel an de cette année a vu la création d'une nouvelle tenue de concert, "unisexe", que vous pouvez voir présentée par quatre des musiciennes sur le site du quotidien autrichien Die Standard. Une manière de rendre les femmes le moins visibles possible.

Et qu'en est-il des autres orchestres symphoniques? William Osborne a exploré en 2009 la situation pour 35 orchestres européens et américains. Je suis de mon côté allée voir ce qu'il en était début 2011 dans cinq grands orchestres, le Chicago Symphony Orchestra, le Koninklijk Concertgebouworkest, l'Orchestre National de France, le London Symphony Orchestra et les Berliner Philharmoniker.

Résultats provisoires, car je reviendrai sur la répartition par instruments et les postes de solistes, des marqueurs importants:
Chicago Symphony Orchestra, 34 femmes sur 98 musiciens
Koninklijk Concertgebouworkest, 38 sur 114
London Symphony Orchestra, 27 sur 97
Orchestre National de France, 35 (au moins, des prénoms étant ambigus) sur 120
Berliner Philharmoniker, 17 sur 122